Il s’agit de Friedrich Rainer (1903-1947 ?), gauleiter de Salzbourg après l’Anschluss, muté à Klagenfurt (Carinthie) en 1941, augmentant son domaine vers le sud en 1943 après la capitulation de l’Italie, arrêté par les Britanniques en 1945, témoin au procès de Nuremberg (cité par la défense de Seyss-Inquart), extradé vers la Yougoslavie et exécuté (officiellement, la date est contestée) le 18 août 1947. Dans les années 1990, son corps est rendu à sa famille et son nom domine une superbe pierre tombale au cimetière de Klagenfurt, le présentant comme un très honorable patriarche. Découvrant la chose en mai 2016, je la mentionne sur ISSN-Facebook (contribution présentement inaccessible) et sur d’autres sites. Echantillon :
Le gauleiter de Carinthie Friedrich Rainer est l’objet d’un satisfecit de la part de son Führer dans un Propos du 2 septembre 1942.
Sa famille n’est pas ingrate et vient de mettre en bonne place une citation de Hitler sur sa pierre tombale. Le texte est lui-même tout un programme : “Ce n’est qu’avec le passé, en l’unissant avec le présent, qu’on construit le futur”.
Il manque la signature.
Les phrases précédentes aussi manquent, faute de place veut-on croire :
” Die Menschheit würde entarten, die Kultur sich rückbilden, wenn erst die Scheu einreißt, eine brauchbare Erbmasse an Lebens- und Kulturgütern weiter zu pflegen nur deshalb, weil dekadente oder rassisch-fremde Elemente in ihrem geistigen Anarchismus oder ihrer herkunftsmäßig bedingten Ablehnung am liebsten die Brandfackel an alle Leistungen der Vergangenheit überhaupt legen möchten.
Umgekehrt wird aber eine schöpferische Rasse die Gesamtsumme der Leistungen ihrer Vorfahren als Stil nicht zu einem tyrannischen Gesetz erheben dürfen, das jede weitere eigene Leistung begrenzt oder gar vergewaltigt.”
“L’humanité dégénérerait, la civilisation dépérirait dès que l’on hésiterait à entretenir un héritage utilisable de biens vitaux et culturels, uniquement parce que des éléments décadents ou étrangers à la race, dans leur anarchisme spirituel ou leur rejet sélectif des origines, se réjouiraient de jeter au bûcher toutes les oeuvres du passé.
Mais inversement, une race créative ne se permettra pas d’ériger comme une loi tyrannique, en tant que style, la somme complète des oeuvres de ses ancêtres, comme un carcan qui borne ou même qui force les oeuvres du futur.”
La phrase retenue, comme les précédentes, est plutôt banale. L’ensemble constitue une profession de fidélité critique envers le passé, si on fait abstraction du rattachement absurde à une race précise des partisans de la table rase, ce qui ne peut, dans la bouche de cet orateur, que désigner les Juifs, et de la notion non moins absurde de “race créative”.
Le nazisme pointe aussi son nez dans le mot “bûcher” (Brandfackel) si on se souvient de l’importance du feu dans les liturgies nazies en général, et des bûchers de livres qui ont culminé le 10 mai 1933 dans les villes universitaires d’Allemagne, mais avaient commencé auparavant et se poursuivent sans relâche au moment de ce discours, prononcé le 15 septembre suivant au congrès de Nuremberg. Le nazisme se veut, dans bien des domaines, un contre-feu, et souvent cela n’a rien de métaphorique.
Mais en l’occurrence, l’homme qui repose ici est un meurtrier exécuté comme tel sur le lieu de ses forfaits, en Slovénie, et cette citation, détachée de son contexte culturel, apparaît à la fois comme une absolution, et de Hitler et de son représentant local, et comme un appel au renouveau du nazisme. Un appel certes discret, certes en contrebande, mais perceptible aux initiés et insupportable, du moins on l’espère, à ceux qui en découvriront le sens.
Je me souviens d’un débat sur Mediapart avec des Autrichiens, qui semble malheureusement perdu. Je leur demandais notamment s’il avaient connaissance d’autres cas de ce genre.
Mais voilà qu’au hasard d’une recherche je tombe sur un article critique, du 9 octobre dernier.
La municipalité réfléchit…
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