Alfred Leitgen : “Hess, incapable de désobéir à Hitler, est parti en Angleterre sans son accord. Mais, nul ne sait ce qu’il se disait entre eux”

(Eingeschränkte Rechte für bestimmte redaktionelle Kunden in Deutschland. Limited rights for specific editorial clients in Germany.) Hess, Rudolf *26.04.1894-17.08.1987+Politiker, NSDAP, Dv.l.n.r.: Adjutant Alfred Leitgen, Hess,Fritz und Klara Hess, die Eltern vonRudolf Hess, Frau Leitgen- etwa 1938 (Photo by ullstein bild/ullstein bild via Getty Images)
Leitgen au premier plan, suivi de Hess et sa famille (parents et épouse) en 1938. (Photo by ullstein bild/ullstein bild via Getty Images)

Alfred Leitgen était journaliste pour le Nachtausgabe en 1933. Chargé de faire un reportage sur les “hommes nouveaux” du parti nazi, il rencontre Rudolf Hess qui décide d’en faire son Premier Adjudant. Il le restera jusqu’au 11 mai 1941, quand il est arrêté sur ordre de Hitler à son bureau PrinzAlbertStrasse. Libéré à l’automne 1944 et versé dans la SS il est fait prisonnier par les Américains jusqu’en 1948. Redevenu journaliste, pour le Mercure de Munich cette fois, il accepte de livrer son témoignage à l’Institut d’histoire de la ville (IFZ) en 1952, puis en 1965. Son témoignage livre une version contradictoire des relations entre Hess et Hitler et du vol du 10 mai 1941.

En 1952, il écrit au Dr Kempner une lettre de 6 pages à la fin de laquelle il évoque le vol de Rudolf Hess du 10 mai 1941 :
“à mon avis, Hess ne s’est pas envolé en Angleterre avec l’accord de Hitler“.

Le Dr Jacobsen, 13 ans plus tard, retranscrit la discussion qu’il a eu avec Leitgen le 12 décembre 1965. Leitgen se confie alors sur la nature des relations entre Hitler et Hess :

“Für Hess war die sog. Führerentscheidung sakrosankt. In diesem Augenblick war fur ihn die Diskussion abgeschlossen.”

Pour Hess la parole du Führer était sacrosainte. Une fois qu’il avait fini de parler, la discussion était terminée. Pourtant, il reste à remarquer que personne ne sait ce qu’il se disait entre Hitler et Hess.”

Ces deux témoignages paraissent se contredire : si la parole du Führer était sacrosainte pour Hess, comment imaginer que Hess lui aurait désobéi en s’envolant pour l’Angleterre ?
De deux choses l’une : soit Hitler a effectivement interdit à Hess de voler, comme il le dira le 11 mai, et alors Hess a désobéi… ou alors Hitler a menti le 11 mai et alors Hess n’a pas désobéi.
On voit que Leitgen a du mal à se débattre avec la vérité. Mais, sans le vouloir peut-être il nous livre la clé de l’énigme :

“Einschrankend ist jedoch zu bemerken, dass niemand weiss, was sich bei den Gesprächen zwischen Hitler und Hess abgespielt hat. Hess hat wiederholt ad hoc Hitler berichtet.”

Pourtant, il reste à remarquer que personne ne sait ce qu’il se disait entre Hitler et Hess.”

Leitgen reconnait implicitement qu’en fin de compte peut-être que Hitler et Hess se sont bien mis d’accord au cours de ces fameuses entrevues.

Leitgen n’en parle pas directement, mais nous connaissons par le témoignage d’autres adjudants la rencontre qui a eu lieu une semaine avant le vol. Ils ont discuté pendant des heures ! De cette rencontre a découlé le discours au Reichstag du 4 mai dans lequel Hitler tend la main (à sa manière) aux Anglais : “débarrassez-vous de Churchill et vous aurez la paix”, dit-il en substance. Ce sont ces mêmes propositions que Hess va répéter le 10 mai en Ecosse. Comment penser que les épisodes ne soient pas liés entre eux ?

Peut-être Leitgen s’interdit-il d’y penser en souvenir de ses 3 ans et demi de prison. Il est le seul du personnel de Hess à être resté si longtemps en cellule. On peut comprendre qu’après-guerre il refuse de remuer ses mauvais souvenirs. Et, en effet, Leitgen refusera toujours de s’exprimer après la guerre : il n’écrira aucun livre (pas même posthume), et ne collaborera avec aucun historien. Il a disparu des écrans radar dans les années 70. Cela rend ces témoignages et les questions qu’ils soulèvent d’autant plus précieux.

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  1. Karl Wolff : “Hess n’était ni capable de mentir à Hitler ni de monter dans son dos son vol vers l’Angleterre. Hess était téléguidé par les souhaits et les pensées les plus secrètes de Hitler.” – International Society
  2. Le vol de Rudolf Hess. La version d’Ernst W. Bohle : “Hitler savait tout” – International Society for the Study of Nazism

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